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3.2 Ethnohistoire et rites funéraires

Les problèmes, que rencontre l'archéologue lors de la détermination de groupes archéologiques, doivent être liés aux données historiques, voire ethnologiques pour les périodes récentes. Un bref aperçu historique de la région du Sine et Saloum permet de comprendre certains aspects de la culture matérielle.

La région du Sine et Saloum était occupée à l'origine par des populations Noon, Ndut et Safeen, selon H. Gravrand (1983). Noon est un mot sereer qui désigne " les ennemis ", car les Noon n'ont certainement pas accepté rapidement la colonisation de leurs territoires par les Sereer. Le sous-groupe Noon a été intégré tardivement au groupe sereer. Les Noon sont peut-être les premiers bâtisseurs de tumulus dans le cas d'une hypothèse endogène du phénomène.

Une vague de population Sosé arriva ensuite du nord-est. Les Sosé viennent peut-être du royaume du Ghana entre le VIIIe et le XIIe siècle. Les Sosés enterrent aussi leurs morts sous des tertres. Je pense qu'à cette période se produit une acculturation avec la zone mégalithique par l'utilisation de pierres frontales et des sacrifices humains et animaux.

Avec l'arrivée vers le XIIIe siècle des Sereer, les Sosé sont soit absorbés, soit rejetés. Si les Sosé sont les premiers bâtisseurs de tumulus (hypothèse exogène), leur rejet s'est-il fait vers le Nord comme le montre la dispersion des tumulus tardifs, par exemple Rao?

Les Sereer s'implantent dans le Sine et Saloum à partir du XIIIe siècle. On ne sait pas si l'ethnie Sereer s'est crée au contact des populations déjà en place dans le Sine et Saloum ou bien si elle était déjà formée lors de son départ du Tekrûr? Sereer est un mot toucouleur qui signifie : " les séparés ", cela plaide en faveur d'une formation progressive de l'ethnie sereer à partir de sa migration.

Selon la tradition orale, les Sereer quittent le Tekrûr au XIe siècle. Avant de s'établir dans le Sine et Saloum et traversent préalablement les régions du Waalo, du Djolof et du Bawol. La durée de leur migration est estimée à un ou deux siècles maximum.

Les Gelwaar sont des populations venues du Sud de la Sénégambie, du royaume du Gaabu. Ce royaume est certainement l'extension occidentale de l'empire du Mali entre les fleuves Gambie et Casamance. Le peuplement mandingue est très important sur la côte atlantique. En effet, de nombreux malinké viennent s'installer au sud du fleuve Gambie à partir du XIIIe siècle. Ces Gelwaar, d'origine malinké, appartiennent à l'aristocratie guerrière et marchande.

Enfin les populations gelwaar se fixent dans la région du Sine et créent le royaume du Djonik au début du XIVe siècle, avec Kulaar comme capitale. Jusqu'à l'arrivée des Gelwaar, il n'y avait pas de pouvoir central dans le Sine et Saloum. Ces régions s'étatisent parallèlement au Grand Jolof avec une même structure lamanale. Les anciens chefs de lignage deviennent des chefs de territoire (gouverneurs).

Les Gelwaar fondent ensuite le royaume du Sine vers le milieu du XIVe siècle. Ils établissent leur capitale à Mbissel puis à Diakhao au XVe siècle. Le rituel d'intronisation se fait sur un tumulus funéraire comme pour le royaume du Ghana :

" Maysa Waaly Jon a été inhumé à Mbissel. Un culte lui est rendu dans la rotonde où la tradition rapporte qu'il a été enseveli. Les rites du couronnement du Maad a Sinig s'achevaient par une cérémonie à Mbissel près du tombeau de Maysa Waaly. Toute la nuit, le nouveau Maad devait rester, seul avec son épouse, face au fondateur de la dynastie et s'inspirer de son esprit pour continuer l'oeuvre politique qu'il entreprit jadis au Sénégal, à partir de Mbissel ".

Les Gelwaar ont permis au Sine et Saloum de s'intégrer dans un processus général d'étatisation, par contre il semble qu'ils n'aient pas modifié les institutions religieuses et funéraires de la région.


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© Internet Archaeology http://intarch.ac.uk/journal/issue3/pradines/32pradines.html
Last updated: Thu Jul 31 1997